J'ai déjà raconté sur ce blogue l'histoire de mon "petit arpent du Bon Dieu". Pour preuve le lien en bas de cette page.
Donc, comme déjà dit, en 1973, âgée de 20 ans, j'avais vendu tout ce que j'avais pour acheter (bien trop cher mais je l'ai su plus tard) 1 hectare 700 de lande où j'ai planté des châtaigniers et que j'ai clôturé, avec l'aide de ma maman et d'un voisin en ce qui concerne cette dernière opération. A l'époque et, je vous rassure (sourire) depuis cela n'a pas changé, je passais au mieux pour une originale et au pire pour une trois quarts folle, voire une folle tout court. Je n'ai toujours pas besoin à ce jour d'entendre les ricanements pour savoir que cela ricane sec. C'est comme un sens supplémentaire.
Depuis 1973, au milieu de cette colline pelée, les arbres ont poussé en toute liberté et se sont multipliés à l'envi. D'autres espèces se sont invitées, principalement des bouleaux. Les tempêtes cassent beaucoup de grosses branches car l'endroit est très venteux, il y a beaucoup de chablis. Bref, dans un joyeux bazar, la nature reprend ses droits sans rien demander à personne.Beaucoup d'animaux sauvages y trouvent leur compte. La joie, la vraie. Depuis 1973, vous imaginez sans peine que la clôture ainsi que le superbe portail de bois qu'avait confectionné mon frère sont partis en lambeaux. A l'automne, les vaches et les pottok qui passent par là le nez au vent ont vite repéré l'aubaine et viennent se servir en châtaignes. Je me rends rarement sur les lieux ("J'ai juste besoin de savoir que ça existe" aurait dit Cavanna) mais à la saison, j'ai vu plusieurs fois des gens munis d'un panier qui ramassaient des châtaignes. Et c'était bien.
Or, il y a quelques jours, je suis montée y faire un tour avec deux amis venus de Carcassonne et une autre, d'origine basque, qui avait fait le voyage depuis l'Uruguay. Les trois étaient admiratifs de la quantité et de la grosseur des fruits. Et trois jours plus tard, j'y retournais avec une autre amie qui souhaitait déterrer deux bébés châtaigniers pour les replanter chez sa maman. En arrivant, surprise! Une dizaine de personnes, toutes en treillis comme à la guerre ou à la chasse, en tous cas pas habillées comme nous (sourire de nouveau), étaient en train de ramasser fiévreusement tout ce qu'elle pouvaient de châtaignes. Il y avait de grandes cagettes très hautes, et même tenez-vous bien, une piscine-bac à sable en forme de coquille comme on en installe l'été pour les bambins. Là-comment vous dire, une bouffée d'agacement face à toutes les moqueries, injures et voire menaces déversées sur les écolos qui plantent des arbres, rejettent en bloc toute forme d'écobuage et qui pensent que nul n'est besoin d'un fusil pour marcher dans la campagne m'est montée brusquement au cerveau. Bon, quand-même je me suis contenue et, m'approchant de l'un de ces chasseurs en tenue de soldat, de ma voix la plus calme et la plus posée possible "Je n'ai pas eu une mauvaise idée, n'est-ce pas, de planter ces châtaigniers en 1973?" Et lui "Oui, mais cette année, il n'y en a pas beaucoup et elles sont petites". Huuuuum! Comme vous voyez, j'ai réussi l'exploit de ne pas en mourir étranglée et j'ai fait mine de m'intéresser à autre chose.
Quand nous nous sommes décidées à redescendre, mon amie et moi, nous nous sommes rendu compte qu'ils retournaient eux aussi à leurs voitures, pas des voitures de miséreux, que ce soit dit en passant, comme ça, l'air de rien. De très loin et le plus discrètement possible, j'ai pris une photo, celle que vous voyez tout en haut de ce "post". Et c'est là que j'ai réalisé qu'ils ramassaient ces châtaignes pour les vendre et que ce n'était certes pas la première année, ce dernier point de leur propre aveu.
Je ne peux rien dire, je ne peux pas protester, le terrain n'étant plus clôturé. Mais je vous assure : m'apercevoir qu' en réalisant cette plantation à la sueur de mon front et sous les lazzi il y a 43 ans, je m'étais conduite moi-même au bout de quelques années à arrondir le compte en banque d'une espèce que j'exècre, celle des chasseurs, j'hésite entre l'autodérision et une saine colère. En fait, je crois que je vais tenter de réaliser un savant cocktail des deux. On verra bien si ça tient la route. Je vous dirai.
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Le petit arpent du bon Dieu. - Le blog de Jeno l'écolo Jenofanimalhumaniste
Photo prise du haut du terrain, cet été. Les premiers arbres. Toujours depuis le haut du terrain, mais de l'autre côté. Vue plongeante sur le fond de vallée ( route de Roncevaux et de Pampelun...
http://jenolekolo.over-blog.com/article-le-petit-arpent-du-bon-dieu-60028278.html
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