Une contribution de Brigitte Fraval.
L'aube douce m'a menée
Au chaud de sa brume légère,
Tendrement enveloppée
Dans le ruban d'argent de sa rivière .
Les arbres bruissent encore
Sombres géants engourdis ,
Peinant à éclore leurs chatons d'or ,
Des cris silencieux de la nuit.
Le chemin serpente au fil de l'eau
Ennoyé de lambeaux évanescents,
Paisible dans l'étrange halo
Précédant l'embrasement du jour naissant.
Les menthes défroissent lentement
Leurs feuilles odorantes
Jetant au vent , murmure arrogant,
Leur audace entêtante.
Sur les pierres du halage ,
La lourde charrette de l'Ankou
Tire son sinistre bagage ,
Dans la plainte de ses roues.
L'heure n'est pas venue de l'éclat têtu
Qui teinte de mauve les bruyères ,
Reléguant la faucheuse déçue
A ses landes austères
Dors tranquille ,petit ,repose
Au singulier mystère de tes rêves
Garde tes paupières mi-closes
sur le jour qui lentement se lève.
Les anciens celtes ne craignaient pas la mort , la considérant comme une chose simple et naturelle,le commencement d'une vie meilleure. Par contre ils avaient très peur de son serviteur l'Ankou .
Tantôt dépeint comme un homme très grand et très maigre aux cheveux longs et blancs,la figure cachée par un large chapeau ,tantôt comme un squelette drapé dans un linceul,l'Ankou circule la nuit debout sur une charrette(karrig an Ankou) dont les essieux grincent sous le poids des âmes des récents défunts. Dans un cas comme dans l'autre il tient à la main une faux dont le tranchant est tourné vers le dehors. On pourrait en fait l'assimiler à un passeur d'âmes.
Il n'est pas si lointain le temps ou ,en Bretagne, on racontait qu'entendre les roues du karrig ou croiser le sinistre attelage signifiait la mort d'un proche ou de soi même.Certains contes parlent d'autres signes comme ,des odeurs de bougie ,des bruits de clochettes ,le chant du coq au milieu de la nuit ...Mais la Bretagne est terre de légendes ….Alors laissons les légendes continuer à s'écrire .
Non il n'est pas si lointain le temps ou l'on faisait peur aux petits enfants trop téméraires en brandissant l'image de l'Ankou aux orbitres creuses qui les attend la nuit venue au détour d'un chemin qu'ils ne doivent pas emprunter. Peut être même que sa cape frôle encore ,en quelques campagnes reculées, le prochain défunt ,celui qui à son tour deviendra l'ouvrier de la mort l'Ankou.