Une contribution de Daniel Labeyrie
Des ailes des ailes au cœur
Dans le jardin perdu touffu de ronces
Des ailes par pitié des ailes par pitié
En un fragile battement d’ailes dans cette lumière inhabituelle de février, il s’en est allé le poète au terme de sept décades.
Artiste singulier, chanteur des chemins de traverse, oiseau des garrigues, fragile et sensible comme une plume de mésange, il nous aura enchantés sur de modestes scènes improbables, sur les sentiers de Delteil et de Cadou, dans nos granges, toujours en quête de fraternité. Nous n’oublierons pas ce soir d’été où il nous embarqua sur son esquif en quelques notes de guitare sur la scène du château de Barjac.
Il fit même chanter un colibri dans une modeste demeure perdue dans un écrin d’arbres et de passereaux. La nuit venue, les hulottes se mirent à l’unisson sous le regard complice de la lune.
Philippe ne fut jamais un poète éthéré, reclus dans sa tour d’ivoire. Il était racine dans la glaise, marchait au pas de l’âne, divulguait ses chants énamourés aux humbles, aux invisibles dont on ne parle guère. Parfois, en quelques gestes, il libérait une envolée d’oiseaux, tutoyait la beauté, nous emportait en frissons entre sourires et larmes.
Tel le Poverello d’Assise, il savait la souffrance, il savait les blessures du corps et de l’âme mais s’accrochait à des rêves de soleil et d’étoiles.
« On n’est jamais trop près du ciel », son dernier enregistrement, marie la gravité de la condition humaine à la quête spirituelle qui l’animait intensément.
Dans le fracas, le désordre et la fureur du monde, son chant est un appel désespéré au bonheur.
« Chante, il n’y a que lui le chant pour célébrer
La grâce, la beauté, la paix, le mystère ».
Daniel LABEYRIE