Vers l'indispensable réforme de la chasse aux oiseaux migrateurs en France
, Pierre Athanaze, Guy Jarry et Hubert Tournier
L'organisation de la chasse en France, telle que nous la connaissons aujourd'hui, s'enracine dans un dispositif
réglementaire datant de 1941. Vigoureusement dénoncée en 2000 par la Cour des Comptes à cause de la confusion qu’elle crée entre les intérêts privés des chasseurs et l’intérêt
général, elle donne aux représentants de la chasse un rôle d’interlocuteur privilégié auprès des institutions gouvernementales à travers un réseau d’influence établi officiellement dans les
rouages administratifs du pays. D’autres réseaux d’influence apportent aux revendications des chasseurs un relais politique déterminant. L’Office National de la Chasse (ONC), devenu ensuite
Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage (ONCFS), est contrôlé par les chasseurs alors que c’est un organisme public financé à 75 % par de l’argent public provenant d’une taxe
(cynégétique). Ainsi les chasseurs (2% de la population française), juges et parties, contrôlent l’essentiel des niveaux de décision relatifs à la chasse et à l’ensemble de la faune sauvage
(mammifères et oiseaux): réglementation, garderie, stratégie, recherche. Il en résulte un décalage entre la réglementation de la chasse en France, les données biologiques fondamentales des
espèces chassées et les Directives Européennes : longue durée de la période de chasse, chasse de nuit, grand nombre d’espèces chassées (2 fois plus que la moyenne européenne) dont 22
déclarées en mauvais état de conservation, 25 millions d’oiseaux tués par an etc…
Il importe de repenser la place de la chasse dans le contexte social et environnemental du XXIème siècle : 1) revoir fondamentalement
l’organisation de la chasse en la sortant du circuit fermé des chasseurs et en l’ouvrant aux exigences de la société civile en termes d’éthique, de loisirs paisibles et de sécurité, et 2) prendre
en compte les données biologiques fournies par la littérature scientifique internationale. L’objectif est de rééquilibrer les différentes formes d’usages de la nature entre ses multiples
utilisateurs, y compris ceux qui refusent le principe de la chasse, en tenant compte des importances relatives de chacun afin de garantir un nouveau rapport entre l’homme et la
nature.
L'un des deux Gypaètes barbus (espèce
protégée et gravement menacée), pris en charge récemment par le centre Hegalaldia.
Introduction
La France est un des rares pays au monde où la chasse pose encore de nombreux problèmes aussi sérieux que récurrents depuis des dizaines d’années. Pour le citoyen,
ces problèmes apparaissent notamment chaque fois que de nouvelles dates d’ouverture et de fermeture de la chasse sont annoncées par le gouvernement, provoquant alors des contestations et des
débats passionnés de la part des chasseurs et des naturalistes. A chaque fois, les données des uns s’affrontent aux données des autres, naturalistes et scientifiques contre chasseurs, et le
public non averti de ces questions se trouve dans l’incapacité de déterminer où se trouve la juste cause. Les débats politiques qui accompagnent les lois réglementant la chasse n’éclairent en
rien le débat, et au final la société civile a de quoi se décourager d’y comprendre quelque chose. Essayons d’apporter l’éclairage que nous donnent nos expériences respectives.
Ici comme ailleurs, pour comprendre le présent de la chasse et envisager son avenir, commençons par regarder le passé, l’histoire de la chasse en France. A partir
de là, nous pourrons mieux identifier la racine des problèmes posés aujourd’hui et faire des propositions pour que la chasse soit adaptée aux exigences et aux contraintes de notre société au
XXIème siècle.
, ayant pris en main la gestion des milieux naturels et des espèces qu’ils hébergent, revendiquent leur droit
d’ancienneté. Les nouveaux venus réclament au contraire un droit de regard sur la gestion de la ressource et l’accès aux espaces naturels. Certains vont jusqu’à contester le principe d’une chasse
omniprésente sur notre territoire. Prendre conscience de cette réalité historique aide à comprendre en partie la virulence des relations avec les chasseurs.
une seule société par département,
obligation pour tout chasseur d’adhérer à cette société,
le Président de la société, élu parmi ses pairs, ne prend ses fonctions qu’après avoir été nommé par le Ministre en charge de la chasse (aujourd’hui les
Préfets).
Ces statuts, toujours en vigueur, établissent une confusion entre les intérêts particuliers des chasseurs et l’intérêt général du pays : la
chasse est un loisir auquel le gouvernement est officiellement et structurellement associé. Les représentants des Fédérations départementales, régionales et nationale des chasseurs sont les
interlocuteurs privilégiés des instances préfectorales et ministérielles : un véritable réseau d’influence est établi officiellement dans les rouages administratifs du pays pour régler tous
les aspects qui touchent à la chasse. En 1972, l’Office National de la Chasse (ONC) est créé en remplacement du Conseil Supérieur de la Chasse, alors sous la tutelle du Ministère de
l’Agriculture. L’ONC dépend désormais du Ministère de l’Ecologie, mais les Présidents des Chasseurs sont majoritaires à son Conseil d’Administration et les trois quarts de son budget proviennent
des taxes cynégétiques payées par les chasseurs, c’est-à-dire d’argent public provenant d’un impôt…. La chasse est un état dans l’Etat, les chasseurs par le biais de cette organisation,
contrôlent tous les niveaux de décisions relatifs à la chasse : réglementation, garderie, stratégie, recherche…, ils sont juges et parties. Puis l’ONC devient l’Office National de
la Chasse et de la Faune Sauvage (ONCFS), c’est-à-dire qu’il a la charge non plus seulement des espèces chassées, mais de l’ensemble de la faune sauvage, tout en restant sous le contrôle des
chasseurs. Un rapport de la Cour des Comptes (2000) explicite toutes ces informations en y ajoutant que ces réseaux où s’entrecroisent les intérêts particuliers des chasseurs et les intérêts
administratifs et politiques du pays, drainent des sommes d’argent considérables (argent public) selon des circuits surprenants (les Fédérations départementales encaissent chaque année quelque
100 millions d’euros). Il faut ajouter que les chasseurs de base, dans leur grande majorité, sont le plus souvent ignorants de ces mécanismes et qu’ils ont bien du mal à le croire, d’autant que
leurs représentants se gardent bien de les en informer.
De surcroît, on observe que la représentation des chasseurs parmi les élus dépasse très largement leur représentation démographique : les chasseurs (environ
1,2 million) ne représentent que 2 % de la population, mais à l’Assemblée Nationale, ils ont constitué un groupe parlementaire qui rassemble 220 députés sur un total de 577 (soit 38 %) ! Au
Sénat, le groupe chasse et pêche y rassemble plus de membres que les groupes de l’eau, de la sécurité, de l’industrie du BTP ou de la gestion des déchets ! Ainsi, les lois et les arrêtés
relatifs à la chasse et à la faune sauvage se succèdent mais ils maintiennent toujours la faune (surtout mammifères et oiseaux) sous le contrôle des chasseurs. En l’état, il ne peut donc y avoir
d’évolution nécessaire et significative de tous les dysfonctionnements dans la gestion de la faune sauvage, pas plus que l’émergence d’une attitude publique plus favorable à la vie sauvage alors
que la plupart des français la réclament. Or, en dehors des espaces urbains, la chasse n’est interdite que sur environ 2 % du territoire national métropolitain (l’essentiel des territoires des
Parcs Nationaux et diverses Réserves). Même si elle n’est pas pratiquée partout ailleurs et notamment pas sur toutes les propriétés privées, la chasse est légale sur 98 % du territoire considéré.
C’est dire que les chasseurs, par leur organisation interne et par les relais établis avec les structures politiques locales et nationales, contrôlent largement la chasse et la faune sauvage sur
l’ensemble de l’espace français.
On ne peut rien comprendre aux problèmes de la chasse et de la protection de la nature en France tant que l’on n’a pas saisi ces mécanismes surprenants,
probablement uniques au monde.
On ne sera donc pas surpris que la réglementation de la chasse aux oiseaux migrateurs soit aussi peu favorable aux espèces et autant décalée par rapport aux
réglementations appliquées dans les autres pays européens : durée de la période de chasse la plus longue, horaires de chasse les plus étendus, chasse de nuit dans 35 départements, nombre record
d’espèces d'oiseaux migrateurs chassés avec 52 espèces d’oiseaux d’eau et oiseaux dits de passage (nombre deux fois plus élevé que la moyenne européenne). Parmi ces 52 espèces chassées, 22 sont
officiellement déclarées en mauvais état de conservation, etc…De surcroît, des dérogations sont accordées en faveur de chasses dites traditionnelles (glu, assommoirs, collets, filets, matoles)
pour différentes espèces d’oiseaux : ces procédés de capture, dans leur majorité ne sont pas sélectifs et la France, selon la jurisprudence européenne actuelle, prend le risque d’être
condamnée par la Cour de Justice des Communautés Européennes. Au final, le tableau de chasse annuel en France dépasse les 25 millions d’oiseaux (ONCFS, 2000).
Certes, la réglementation a subi quelques avancées au cours des 30 dernières années, notamment en termes de réduction de la période de chasse, mais ces
améliorations ont toujours été obtenues contre l’avis des chasseurs et des structures qui les représentent. Elles ont été acquises seulement grâce au combat mené par des
naturalistes et des scientifiques qui ont apporté les arguments scientifiques objectifs nécessaires, par des juristes et quelques associations de protection de la nature qui n’ont eu d’autres
choix que de se pourvoir devant les juridictions compétentes lorsque les principes contenus dans la Directive Européenne concernant la conservation des oiseaux sauvages étaient bafoués. Ces
actions ont parfois obtenu l’appui des instances européennes et de quelques rares et courageux parlementaires et Ministres de l’Environnement (notamment D. Voynet et Y. Cochet).
On s’étonnera que les données biologiques établies sur des bases
scientifiques indiscutables tendent à être minorées, voire contestées lorsqu’elles interviennent dans les prises de décision quant à un exercice de la chasse respectueux des exigences
fondamentales des espèces concernées. Certes, ces données existent et elles sont publiées dans des revues scientifiques internationales dont les comités de lecture garantissent le bien fondé des
analyses et des résultats. Elles constituent la référence scientifique qui sert à définir les normes fixées par la Commission Européenne. Mais elles sont souvent contestées par les chasseurs
français qui leur opposent leurs propres données issues des personnels travaillant sous leur contrôle. Ces personnels peuvent avoir de bonnes qualifications universitaires et une motivation
réelle (c’est particulièrement vrai au sein de l’ONCFS), mais leur appartenance ou leur dépendance du monde de la chasse les conduit à des conclusions qui vont trop souvent dans le sens voulu par
leur organisme de tutelle, surtout quand il s’agit d’espèces chassées ou d’espèces qui posent question aux chasseurs. On dispose ainsi de deux grands ensembles de données dites scientifiques,
d’une part celles provenant des chercheurs et universitaires qui répondent à des objectifs scientifiques selon une démarche objective, et d’autre part celles provenant de personnes qui, par le
biais du financement de leurs travaux, sont au service de la chasse. On retrouve là une situation déjà bien connue et plus sensible encore, celle des « scientifiques » de l’amiante, du
sang contaminé, des pesticides, des OGM, des hormones de croissance etc… et nous en connaissons les conséquences. Avant de lire des résultats scientifiques, et aussi invraisemblable que cela
puisse paraître, il est désormais indispensable de connaître l’origine du financement qui les a rendus possibles. Et il ne suffit pas de se contenter de vérifier que les chercheurs sont rattachés
à tel ou tel laboratoire (CNRS ou Université) pour croire en leur indépendance, il faut encore s’assurer que le financement de leurs travaux est bien un financement public, car les organisations
industrielles, commerciales ou cynégétiques peuvent aussi apporter leur concours financier aux laboratoires universitaires et au CNRS ! Pour tous les scientifiques indépendants et objectifs,
cette situation, récente pour ce qui concerne la chasse, n’est pas acceptable, mais ne pas oser la regarder en face serait faire preuve aujourd’hui d’une profonde naïveté.
II – LA CHASSE en France au XXI ème siècle
Il est temps aujourd’hui de repenser la place que la chasse peut occuper dans le contexte social et environnemental du XXIème siècle. Les quatre niveaux
d’action rapidement développés ci-dessous peuvent être considérés comme les bases interactives d’une nouvelle réflexion à conduire sur la chasse. La réglementation doit en effet être
définie, non pas seulement par les exigences biologiques des espèces et par l’état des populations animales, mais aussi par certains aspects de la démographie humaine (nombre des chasseurs,
nombre des non chasseurs et des personnes hostiles au principe de la chasse), par le nombre/l’étendue des réserves et par les attentes de la société civile en termes d’éthique, de loisirs
paisibles et de sécurité.
La chasse est une activité de loisir parmi d’autres, elle correspond aux aspirations d’une partie limitée de la population et doit rester dans le contexte
associatif qui est le sien. Les fédérations de chasse et l’ensemble des structures cynégétiques devraient relever d’un statut de droit privé sans mission de service public, ce qui implique une
modification de la loi de 1941 instituant les Sociétés (Fédérations) Départementales de Chasse. Dans le même temps, l’Etat devrait se doter de services administratifs, techniques et scientifiques
indépendants pour aborder les questions relatives à la nature et à son exploitation. L’ONCFS pourrait répondre à ces critères, mais à la condition expresse qu’il rompe les liens privilégiés
(financiers et administratifs) qui le lient actuellement aux chasseurs et qui le privent de l’indépendance requise pour avoir une démarche scientifique objective (Bardery 1991). Un tel organisme
rebaptisé et affecté au service de la nature et de ses ressources deviendrait alors, en partenariat avec les Universités et les organismes de recherche plus fondamentaux (type CNRS), l’outil
administratif et scientifique d’envergure qui manque cruellement à la France aujourd’hui, alors qu’il a été décliné avec succès dans de très nombreux
pays, y compris dans des pays en voie de développement.
La réglementation de la chasse ainsi que sa mise en application devraient être revues à la lecture des données scientifiques internationales existantes et mises en
adéquation avec le contenu des textes communautaires, ceux de la Directive Oiseaux en particulier. La plus grande attention doit être portée sur l’origine des données biologiques afin de
s’assurer de leur crédibilité scientifique. Aujourd’hui, le document synthétique le plus approprié en France pour les oiseaux migrateurs est le rapport Lefeuvre (2000) réalisé à la demande du
Premier Ministre par un groupe de huit experts (Universités, CNRS, Museum National d’Histoire Naturelle et ONCFS) sous la direction du Professeur JC Lefeuvre. Ce rapport qui préconise notamment
une période de chasse, unique pour toutes les espèces, comprise entre le 1 octobre et la fin janvier au plus tard, n’a jamais été complètement pris en considération par les pouvoirs publics, à
cause d’une opposition farouche des chasseurs. Le contenu de ce rapport a même fait l’objet de critiques acerbes et de manœuvres visant à le décrédibiliser. Il importe de le réhabiliter, quitte à
lui adjoindre d’éventuelles acquisitions nouvelles, et de l’utiliser comme base de réflexion. Enfin, les données les plus récentes de la littérature scientifique internationale font état de
l’impact considérable du seul dérangement par la chasse sur l’équilibre physiologique et énergétique des oiseaux (cf. Tamisier et al. 2003, pour une revue de littérature sur ce sujet).
La suppression de la chasse de nuit (chasse par ailleurs très meurtrière pendant les vagues de froid) apparaîtrait ainsi comme un progrès décisif à attendre pour libérer les lieux d’alimentation
nocturne des canards en migration. Dans un autre ordre d’idées, les lâchers d’animaux et les différentes formes d’agrainage traduisent des dérives et échecs de la gestion cynégétique. Ces
pratiques condamnables expriment ce qu’est la cynégéticulture (aménagement de la nature au profit de la chasse) et tendent à empêcher toute forme d’autorégulation de la pression de chasse. On
ajoutera enfin, non sans humour, que la réglementation n’a de sens que dans la mesure où elle est réellement respectée, ce qui n’est pas totalement le cas aujourd’hui, faute d’un nombre suffisant
d’agents chargés de la police de la chasse. Et la réduction prévue du nombre de fonctionnaires peut faire craindre le pire.
Cannelle, dernière ourse brun de souche pyrénéenne, a payé de sa vie la complicité honteuse du monde politicien avec le lobby de la chasse. En relaxant le chasseur qui a tiré,
la "justice" (?) l'a tuée une deuxième fois.
Les chasseurs (environ 1,2 millions en 2007) ne représentent que 2 % de la
population totale en France : les Français dans leur très grande majorité accèdent aux espaces naturels (forêts, rivages maritimes, lacs, marais, prairies, rivières) avec l’espoir d’y
trouver calme et tranquillité et pour y observer des animaux. Certains, pour des raisons d’éthique personnelle, n’acceptent pas le principe de la chasse dans la mesure où ce loisir est
indissociablement lié à un acte de mort. Pour cet ensemble de raisons, les divergences entre le grand public et les chasseurs sont évidentes et les sondages d’opinion, malgré leurs limites,
montrent que ce conflit est plutôt croissant : il y a de moins en moins de chasseurs et de plus en plus de citoyens désireux d’avoir un contact paisible avec la nature, il y a aussi de plus
en plus de personnes hostiles au principe de la chasse. En dépit de cette tendance nette, le monde de la chasse continue d’obtenir un soutien politique puissant à haut niveau. Compte tenu de
cette nécessaire redistribution des rôles au sein de la société, une réflexion nouvelle doit être portée sur les modalités d’un partage des ressources de la nature entre tous les utilisateurs.
Cela peut concerner la durée de la période de chasse, le nombre d’espèces chassables, les modes de chasse. Cela peut aussi porter sur l’interdiction de la chasse certains jours de la semaine, y
compris ou peut-être même d’abord les dimanches et jours fériés puisque ce sont par excellence les jours de sortie en famille. Cela peut enfin porter sur l’accroissement des espaces non chassés
parmi les espaces publics (domaine maritime, domaine forestier) ou parmi ceux qui sont gérés par les collectivités locales et nationales. L’objectif est de rééquilibrer les formes d’usages de la
nature entre ses multiples utilisateurs en tenant compte des importances relatives de chacun. Sans aller jusqu’à considérer que les chasseurs (2% de la population) ne devraient pouvoir chasser
que sur 2 % du territoire public national, on mesure la marge qui reste pour trouver un équilibre. Prendre en compte les attentes de la nouvelle société civile pourrait aussi conduire à repenser
fondamentalement la place de la faune sauvage dans sa valeur patrimoniale universelle. Les oiseaux migrateurs sont un patrimoine international et, à ce titre, devraient être protégés. Seules des
dérogations pourraient être obtenues afin d’encadrer la chasse sur des espèces dont l’état de bonne conservation est démontré.
L’accroissement des performances balistiques des armes de chasse doit être également
pris en considération : aujourd’hui, une balle utilisée pour tuer les ongulés peut porter jusqu’à 5 km : c’est ce que l’on appelle une balle perdue. Ainsi, la promenade en forêt
(domaniale ou communale) un dimanche, jour de battue aux sangliers ou de chasse aux cervidés (cerfs, chevreuils) n’est plus envisageable sereinement et pose de réelles questions de sécurité. Les
cartouches à grenaille de plomb ou d’acier utilisées pour les oiseaux ou le petit gibier portent jusqu’à 200-300 m. A cette distance, elles ne sont pas meurtrières pour l’homme, mais elles le
deviennent de plus près. Or la réglementation actuelle permet de chasser jusqu’à 150 m d’une habitation, voire même tout contre à condition de lui tourner le dos ! Elle autorise la chasse
sur des espaces publics (forêts, bords de mer etc…) et sur des chemins communaux, voire sur le bord des routes communales et même dans certaines réserves naturelles qui sont par ailleurs
fréquentés par des promeneurs, des marcheurs, des cyclistes, des automobilistes etc… Cette situation traduit un vieillissement de la loi qui ne s’est adaptée ni à l’évolution des armes, ni à
l’intensification de l’usage de l’espace par le public. Aujourd’hui, on peut dire que les notions les plus élémentaires de sécurité ne sont pas garanties. Il semble important de définir des
périmètres de sécurité autour des espaces chassés de façon à prévenir tout accident ou dérangement sur les espaces voisins, en tenant compte notamment des performances des armes et des munitions
utilisées. Les normes retenues sur les terrains militaires où ont lieu des tirs réels pourraient être utilement consultées à cet égard.