Il s'appelait André Dumont. C'était le cousin de mon père.
Dès les années 60, il entreprenait de lutter pour sauvegarder les forêts de l'Oise et du Sud de la Picardie, déjà menacées par
l'urbanisation, les grands axes de communication et --- la gestion calamiteuse de l'ONF: enrésinement, coupes à blanc étoc, etc.. En 1970, il créait l'association "Sauvegarde des forêts
Sud-Picardie-Valois".
Ci-dessous, des illustrations et un article de lui publiés dans "Les trois abeilles", journal d'information à Compiègne en Avril 1970.
La fondation et les débuts de la Société pour la protection de la forêt de Compiègne (SPFC)
par François Callais
Introduction
La Société pour la protection de la Forêt de Compiègne rassemble ceux qui aiment cette forêt et veulent donc mieux
connaître cette œuvre humaine, relativement récente et sur laquelle il y a encore beaucoup à découvrir. La forêt de
Compiègne fut connue jusqu’à la fin du XVIIe siècle sous le nom de forêt de Cuise. Elle se serait constituée à partir du Ve siècle, après les grandes invasions germaniques et l’abandon des sites
habités gallo-romains, avec la mutation du saltus, formé de pâturages et d’espaces plus ou moins boisés mais aussi parsemé de centres d’exploitation agricole. Le saltus
s’est progressivement transformé en ager –espace cultivé- autour de la forêt de Compiègne qui aurait à peu près trouvé ses limites actuelles à la fin du XIe siècle ; elle atteignait 13.000 ha en 1650 et 14.450 en 1870, chiffre qu’elle garde à peu près actuellement. Elle fut protégée en tant que
terrain de chasse et d’entraînement pour la cavalerie puis percée systématiquement depuis François Ier pour la chasse à courre royale, ce qui lui donne ce tracé exceptionnel de voies
concentriques autour du Puits du Roi et sa division en parcelles souvent triangulaires. Il fallut maintenir un équilibre entre la futaie de beaux arbres
-exploités notamment pour le bois de marine- et le taillis-hallier qui sert de refuge pour les animaux. Cette forêt, d’abord gérée par des Grueries, le fut ensuite par le corps des Eaux et
Forêts qui avait la charge des arbres tandis que la capitainerie des chasses celle des animaux. Il
fallut longtemps veiller aux éventuels empiétements et exercer une surveillance sur les prélèvements et usages qui permettaient de vivre aux communautés villageoises ou
religieuses (ces droits ont joué un rôle relativement important jusqu’au milieu du XXe siècle).
I- La Crise (1964-1972)
La vénérable institution des Eaux et Forêts traversa la tourmente révolutionnaire et il fallut la loi de 1964, -qui porte
le nom de son inspirateur, Edgard Pisani-, pour la remplacer par un Office national des Forêts ayant « vocation industrielle et
commerciale ». Cette loi -réclamée par les marchands de bois- avait rencontré une opposition au Sénat mais aussi au sein même de la séculaire administration des Eaux et Forêts. Le terme de
« conservateur », jusqu’ici porté si fièrement par les cadres supérieurs les plus élevés, ne semblait plus de mise.
La polémique va se poursuivre. Le secrétaire d’Etat à l’Agriculture, Bernard Pons,
déclare : « La forêt n’est pas un monument historique » puis Michel Cointat, ministre de l’Agriculture, que « la forêt
est devenue un outil économique de la nation ce qui implique qu’elle doit être gérée comme un champ de petits pois ou de tomates ». On pouvait ainsi redouter une industrialisation
systématique de l’exploitation en vue d’une productivité immédiate. Le nouveau directeur de l’O.N.F., l’ancien préfet Christian Delaballe, était accusé de vouloir imposer ces vues
industrialistes aux cadres plus ou moins réticents des Eaux et Forêts.
A Compiègne, on s’alarme des coupes rases ou à blanc étoc, de plus en plus nombreuses et surtout plus vastes, sous prétexte de
vieillissement -alors qu’elles sont parfois pratiquées sur des peuplements encore jeunes-, trop souvent suivies de replantations aventurées avec un
empoisonnement de la végétation adventice par des pesticides ;
ces coupes découvrent le sol défoncé et détruisent sa structure biochimique, anéantissent la faune souterraine, or la forêt
est fragile et garde d’une manière souvent indélébile la trace des blessures qui lui sont faites. La forêt, formation séculaire, complexe et équilibrée, ne peut pas être remplacée par des
plantations d’arbres à l’avenir incertain ; la forêt cathédrale est le fruit du temps ; il ne faut pas confondre espace boisé et forêt. Il n’y a forêt que si l’homme permet à la nature
de se régénérer par ses propres moyens et lui accorde ainsi une certaine autonomie. S’il est relativement facile de faire de l’argent avec la forêt on ne peut pas faire à volonté de la forêt avec
de l’argent ; l’erreur est souvent irréparable et il faut proscrire le risque. Une génération n’est que dépositaire du bien dont elle a hérité et qu’elle a le devoir de transmettre aux
générations suivantes ; on ne doit pas adapter systématiquement la forêt à la demande d’un marché d’ailleurs fluctuant – une
civilisation audiovisuelle de masse succédant à un papier de plus en plus réservé à une élite- car les essences sont plus ou moins adaptées au sol et au microclimat.
Il faut aussi se replacer dans l’atmosphère de l’époque, c’est déjà le triomphe d’une technocratie abusive dans presque tous les domaines, non
seulement avec le concept de la forêt usine à bois mais aussi dans l’éducation, telle la méthode de lecture globale imposée par des expérimentateurs doctrinaires qui se sont rendus maîtres des
services pédagogiques depuis la fin de la dernière guerre et dont les ministres actuels ont de la peine à se libérer. A cette technocratie triomphante s’oppose une écologie à la fois
scientifiquement argumentée et sentimentale.
L’agglomération de Compiègne qui avait si longtemps vécu de sa forêt venait de doubler sa population en une vingtaine d’années et, à la suite du nouveau pont routier de Jaux à Royallieu et de la rocade sud qui empiétait d’ailleurs sur la lisière, la route du carrefour Napoléon à la
Faisanderie venait d’être élargie afin de rejoindre celle de Soissons, cisaillant ainsi une partie du massif forestier. Il faut donc faire face à la menace
de l’urbanisation et des flux routiers; faire reconnaître la participation des usagers dans la gestion d’une forêt domaniale à
vocation touristique et écologique particulière.
N’oublions pas que nous sommes au lendemain des événements de 1968 et qu’en janvier 1971, lors d’un remaniement de son gouvernement, Jacques
Chaban-Delmas crée le ministère de Protection de la Nature et de l’Environnement, dont fut chargé Robert Poujade. A Compiègne –où l’on observe la même prise de conscience- se fondaient : en 1972, la Société pour la protection de la Forêt de Compiègne, née de la crise qui suivit la mutation de l’administration des Eaux et
Forêts ; en 1974, la Sauvegarde du Vieux Compiègne, qui prenait dans ce domaine le relais de la Société historique.
Il y avait un précurseur, André Dumont------ Il avait participé en 1964 -l’année même
de la loi Pisani- à la fondation d’une association Les Amis de la Forêt de Compiègne mais elle fut tenue en tutelle par l’O.N.F. C’est pourquoi il fonda, en décembre 1970, la
Sauvegarde des Forêts Sud-Picardie-Valois dont il fut le secrétaire et James Michel Kuntz le président. Il écrivait beaucoup aux parlementaires ainsi que dans un journal local, Les
trois abeilles, mais son action paraissait limitée, dépourvu qu’il était d’une équipe efficace et d’une audience lui permettant de jouer le rôle de « groupe de pression » ; il adhéra d’ailleurs à la S.P.F.C. car, malade, il ne se sentait plus capable de
poursuivre la lutte et mourut d’ailleurs peu après.
II La Révolte : Le lancement de la SPFC (1972-1974)
La Société pour la Protection de la Forêt de Compiègne, fut déclarée à la Sous-Préfecture de Compiègne le 24 mai
1972 ; sa compétence s’étendait aux forêts de Laigue et d’Ourscamp-Carlepont. Elle naquit à La Brévière, commune de Saint-Jean aux Bois, où plusieurs Parisiens avaient élu domicile. Le chanoine Coulaud, curé de cette paroisse et personnalité reconnue à Compiègne, encouragea sa formation
et fit même partie de l’équipe initiale de protestation contre la politique de l’O.N.F ; mais plusieurs de ceux qui avaient pris cette initiative ne voulurent pas
s’engager à une activité astreignante qui nécessitait un engagement sur place, ce qui provoqua un immédiat remaniement, dès l’été suivant,
avec une équipe d’action organisée et durable. Le premier président, Pierre Mouet, fit place au premier secrétaire général, Gilbert
Legendre, personnalité sympathique et efficace, à la fois animateur et homme de dossier, qui savait s’adresser au plus haut niveau. Il fut secondé par Paul Bordet, nouveau secrétaire général, plus tard second
vice-président. Cette personnalité cordiale et d’expérience parcourait quotidiennement les sentiers de la forêt et fut chargé de sa surveillance et des
rapports avec l’ONF. Edmond Daynes, vice-président, fut chargé du Bulletin et de la propagande ; il eut l’initiative d’un autocollant
publicitaire puis d’une médaille de reconnaissance. Ces trois fortes personnalités furent véritablement les fondateurs de l’association
qui lui doivent son implantation et ses premiers succès. A ce premier noyau s’adjoignirent plus ou moins longtemps : au secrétariat, Alice Urlacher puis Suzanne Godefroy ; à la
trésorerie, Christian Chardonnereau puis M. Urlacher, à la propagande, M. Bally, citons encore Henri Michel Durin. Quant à moi, on me décerna lors de l’assemblée générale du 24 novembre
1972, le titre pompeux de « conseiller historique» mais en fait je ne fus qu’un modeste auxiliaire; bientôt rejoint par Pierre Moglia, promu « conseiller scientifique ». Je participe aussitôt à
une campagne d’affiches car il fallait d’abord s’imposer, se faire connaître et reconnaître, ce fut vite fait grâce à une équipe dévouée, autour d’un président
dynamique.
Une page réservée dans PUB, la première feuille de publicité lancée à Compiègne, eut une large audience et avertit de cette fondation et de
ses raisons. Dès le samedi –jour de marché- 21 octobre de cette année 1972, la SPFC (ces sigles furent vite adoptés) tint un comptoir d’information place de l’Hôtel de ville ; puis elle
manifesta le 24 octobre suivant au cinéma Celtic (rue des Gournaux, alors contigu aux Arcades du Petit Lendit) lors de l’enchère publique des coupes, on y défila, porteurs d’un ruban vert. Le 1er
mai 1973, on se rassembla auprès de diverses coupes rases. Le 4 juin, des banderoles furent brandies lors de la visite d’un secrétaire d’Etat au Tourisme, Aimé
Paquet, qui inaugurait un sentier de grande randonnée au carrefour
Callisto : on lui remit une motion et divers documents. Le 14 octobre 1973, on distribua des tracts lors d’une randonnée pédestre du Touring Club de France au carrefour Villequier, auprès d’une coupe récente.
Par constat d’huissier on prouve que des coupes rases sont faites en pleine sève et que plus de la moitié des hêtres replantés sont
morts. Des promenades, à la fois écologiques et touristiques, sont organisées, certaines avec la participation du club Hourvari, représenté par M. Bousquet et Raymond Oheix.
Malgré une presse régionale malveillante -sauf localement : Les Trois Abeilles- et des marchands de bois puissants, ces procédés
permirent de rassembler jusqu’à 670 adhésions, chiffre atteint en septembre 1974. Deux importants articles de Jean Rambaud parurent dans Le Monde, les 26 et 27 juin 1973. Ils traitaient de la
situation des forêts notamment à Compiègne et après enquête sur place. Gilbert Legendre publiait
tracts et articles destinés au public mais aussi aux élus et aux fonctionnaires : Lettre ouverte au premier ministre (octobre 1972), Manifeste (avant la vente aux enchères,
octobre 1972), Protection de la forêt et politique des espaces verts, Aux vrais amis de la forêt,…sans compter les résumés de ses rapports moraux. Il y compare les technocrates
de la forêt aux médecins de Molière qui tuent leurs clients à force de saignées abusives mais d’un bon rendement financier. L’Office afin de ne plus être soumis au primat « commercial et
industriel » devrait être rattaché au ministère de l’environnement, on devrait lui permettre les éventuelles subventions de l’Etat et des collectivités locales, les associations de
sauvegarde devraient être représentées dans son conseil d’administration, le directeur de l’Office devrait être proposé par ce conseil et non plus nommé par le ministre.
Un Bulletin fut lancé en 1975, Gilbert Legendre y présenta des études très argumentées, telle la série intitulée « Couper
plus ». Sa rédaction fut assurée par Edmond Daynes jusqu’en 1980, puis par moi-même. Il fut repris en 1984 par Madeleine Troncin puis Elie Fruit mais sa parution se fit
irrégulière avant de cesser. Cet arrêt fut certainement dommageable et contribua –avec l’arrêt
de nos manifestations médiatisées- à la diminution du nombre de nos adhérents. Les avis envoyés lors des diverses manifestations, souvent sous le titre Information Forêts furent loin de remplacer des articles de
fond ou d’actualité que l’on pouvait commenter non seulement à Compiègne mais aussi dans les diverses sociétés amies de la Fédération.
L’association allait réussir son lancement grâce à
cette forte combativité mais aussi à une argumentation scientifiquement fondée : elle eut la chance de bénéficier dès ses débuts des conseils de Clément Jacquiot, conservateur des Eaux et
Forêts à Fontainebleau, membre de l’Académie d’ Agriculture, d’Aymonin, sous-directeur du Museum et de Paul Tombal, professeur à l’université de Lille.
Il fallait aussi s’unir. Dès le 30 janvier 1973, à
Paris, au Musée social, les associations d’Amis des Forêts d’Ile de France se réunirent sur l’initiative de Gilbert Legendre. Une Fédération des amis des forêts de l’Ile de France et du Bassin parisien naquit ainsi le 3 avril 1973 et son conseil d’administration fut
reçu à Compiègne le 4 novembre 1974. Henri Walcke, habitant entre Rethondes et Paris, fut longtemps chargé de suivre les réunions de la Fédération, il devait devenir vice-président et surtout
jouer un rôle important en montant un film sur la forêt à partir de vues prises à partir d’un avion spécialement affrété ; ainsi étaient visuellement exposées les plaies provoquées par des coupes à blanc étoc excessives et faites dans de mauvaises conditions de reprise.
III L’apaisement et la coopération (1974-1980)
Des résultats tangibles vont être obtenus. Les relations hostiles avec l’ONF -du moins avec certains cadres supérieurs- s’apaisent avec le
départ de l’ancien préfet Delaballe, remplacé à la tête de l’Office, en avril 1974, par Yves Bétolaud, un forestier. Forestiers locaux et associations de sauvegarde sont conscients qu’il faut
mener une lutte commune. Le docteur Bernard Woimant, président du Comité national des sentiers de grande randonnée, qui a soutenu la SPFC mais sans participer aux manifestations, dans une lettre
du 3 mai 1974 adressée à Bétolaud, souhaite la réduction des coupes dites à blanc avec régénération artificielle dont l’emploi fut trop systématique. Ces coupes sont parfois
nécessaires si on a trop laissé vieillir la futaie ou que la qualité du sol est insuffisante, mais elles se sont surtout généralisées faute de personnel suffisant : au lieu du martelage et
de la surveillance des coupes successives, avec les travaux annexes, on se contente d’indiquer sur la carte les cantons à abattre ; on simplifie ainsi le travail des marchands de bois qui
préfèrent ce mode d’exploitation. Il faut aussi contenir l’urbanisation, freiner la circulation des engins motorisés, entretenir les sentiers de petite comme de grande randonnée. La chasse à tir
devrait être réglementée. C’est un mode de prélèvement normal et sélectif du gibier ; il permet certes l’équilibre sylvo-cynégétique, réduit les dégâts des riverains,
maintient un cheptel en bonne santé mais ne devrait pas être autorisé dans les zones de silence et éviter les abords des sentiers balisés et les fins de semaine.
Bétolaud répond, le 14 mai suivant, par une lettre apaisante où il prône l’équilibre entre la production nécessaire –car la forêt domaniale
est seule capable de cultiver des feuillus à très longue révolution, au cycle trop long pour les privés-, la protection, la chasse, la récréation. Bétolaud
visite Compiègne le 13 septembre suivant et reçoit longuement le bureau de la Fédération.
Le 30 septembre, Gilbert Legendre, annonce « un changement de cap » : 1) nos manifestations bruyantes nous ont valu un afflux
d’adhérents mais nous risquons de passer pour des gens excessifs et nous rejetons la tactique des « écoguerriers » en Fontainebleau 2) pas de retour à la structure ancienne de Colbert
mais une simple adaptation de l’Office 3) la production de bois est nécessaire dans un pays où les matières premières n’abondent pas et où l’Etat n’a pas le seul souci de l’environnement.
L’Office reconnaît certaines erreurs de gestion. Il n’y aura pas de coupe à blanc en 1974 et 1975. La SPFC obtient l’abandon des coupes rases systématiques et vastes.
Le retour à l’équilibre est cependant constamment menacé par la mécanisation lourde, par les afflux de plus en plus mal maîtrisés et si
difficiles à contrôler, faute de moyens et de personnel ; il y eut encore des excès, ainsi en 1977 : deux hectares et demi sont rasés près du carrefour Atalante. Ces coupes rases sont
désormais limitées à moins de dix hectares et après consultation de la SPFC ; à partir de 1979 on préconise de les limiter en tout cas à 30 mètres de largeur, en bande étroite ou en
rond. Avant les coupes à blanc étoc on doit essayer l’ensemencement là où la régénération a échoué. Les plantations en résineux ne seront pratiquées que sur
les terrains qui s’y prêtent et pour préparer en sous-étages une plantation de hêtres.
A l’occasion de l’« Année du patrimoine forestier», un colloque se tint, le 26 octobre 1979, à l’Université de technologie, sous la
présidence de Bertrand de Jouvenel ; la SPFC s’y associa puis organisa son propre colloque, le 8 mai 1982, en recevant la Fédération au Centre Benjamin Franklin.
La SPFC allait récolter le fruit de
son action, elle s’était d’abord imposée comme interlocuteur redoutable mais qualifié, puis avait su dialoguer avec les autorités compétentes. Dès 1977, elle participe au
comité départemental de l’environnement. 1978 fut une année faste pour l’association car elle obtient un double agrément : par
arrêté préfectoral du 3 janvier 1978 elle obtint le droit d’intervenir dans l’élaboration des plans d’occupation des sols (P.O.S.) de Compiègne et, par arrêté ministériel en date du 2 mars 1978
elle fut agrée et put ainsi participer à l’action des organismes publics pour la protection de l’environnement sur tout son domaine et, éventuellement, intenter une action en justice auprès des
juridictions administratives et comme partie civile en pénal. Par arrêté ministériel du 21 mai 1980, est délimitée une « réserve biologique » de 121 ha située au pied des Grands Monts. Elle avait été promise dès 1975 et mise au point par Aymonin, sous-directeur du
Museum et Tombal, professeur à l’université de Lille. Le 2 juillet 1980, une réunion inaugura la concertation régulière entre la S.P.F.C.
et l’O.N.F., désormais acquis à la gestion durable qui privilégie le long terme et non plus la rentabilité immédiate, favorise l’industrie en
aval et non la production de bois en amont, bannit les plantations monospécifiques et équiennes. La SPFC a pour rôle d’informer le public et d’obtenir les moyens nécessaires afin de mieux
entretenir la forêt
Il y a cependant trop de chemins à restaurer. Il faudrait donc sanctionner les adjudicataires défaillants, mais il est parfois difficile de
déterminer le coupable quand plusieurs exploitants utilisent le même chemin menant à des coupes différentes et il faut des délais et des conditions météorologiques convenables.
L’entretien des voies de vidange des bois ne peut pas entraîner un empierrement généralisé coûteux et un bitumage inesthétique qui faciliterait une
ouverture excessive à une circulation motorisée fatale à l’équilibre biologique. Il ne faut pas négliger le fauchage des chemins, l’entretien des ponceaux et des poteaux de carrefour, le maintien
de la propreté afin d’éviter une « forêt poubelle »,…tout cela en tenant compte de la conjoncture politique et économique ainsi que des fléaux naturels.
Conclusion : Maintenir et progresser
Gilbert Legendre ne pouvant plus assumer la direction de la SPFC (il en garde la responsabilité jusqu’en 1985), le relais fut pris par
Madeleine Troncin qui sut maintenir une activité régulière, avec une équipe peu à peu renouvelée. Elle s’était fait connaître par sa participation à la défense des rives du lac de
Pierrefonds, menacées en 1977 par un projet de lotissement. La SPFC avait soutenu efficacement ce combat et, dès 1978, Madeleine Troncin entra au conseil et
devint en 1980 secrétaire générale, enfin présidente en 1986, après un intérim d’Elie Fruit (1985-1986). Elle fut secondée par le parfait connaisseur des arcanes législatives et juridiques qu’est
l’abbé Bernard Merlette, mais aussi médiéviste érudit, ainsi que par Hervé Gaultier de Carville qui fut d’abord trésorier puis secrétaire général jusqu’à sa
mort en 1990. Elle sut maintenir les liens avec la Fédération qui, le 21 octobre 1989, fut accueillie à l’Hôtel de ville en présence du préfet. L’assemblée
générale annuelle était l’occasion d’une conférence sur des sujets divers mais qui intéressaient la forêt : « Les cervidés » par Bonnet (SAFHEC), « Le papier recyclé »,
« Les pluies acides », « Les tailles douces » par Francis de Jonghe (expert à la Mission du paysage, au ministère de l’urbanisme), « La maison à ossature en bois » par Edmond Englebert (CILOVA), « Les poteaux de
carrefour » par Lemoine, « De la forêt au terrain de golf » par Peronin (ingénieur chimiste), « La forêt polluée » , « La vie mystérieuse des plantes » par
Philippe Larère qui présentera aussi « Le Ginkjo Biloba », « Les grands animaux de la forêt » par Didier Dumay, « Les champs de manœuvre concédés à l’armée »,…. Des sorties furent organisées, notamment lors de la Journée de l’Arbre, soit en Compiègne soit dans les massifs voisins : écoute
matinale des oiseaux, visite de la réserve biologique,Vilfernoy, marais de Sacy, Jardin des plantes, ...La Société participa à diverses campagnes, nationales ou régionales (année de la
forêt, année du patrimoine) : exposition sur le papier recyclé à la bibliothèque du Puy du Roy. Des vœux : contre le projet d’agrandissement du carrefour Napoléon au
détriment des arbres et du lycée Pierre d’Ailly, les lisières périurbaines et la zone de protection forestière, les pistes cyclables souhaitées plutôt en bordure des routes,
les passages à ménager pour animaux,…. Elle intervint à la commission départementale des sites. Elle participa aux campagnes de la Fédération. Elle soutint, particulièrement, en 1995, l’action
menée par Didier Dumay, ingénieur et alors chef du Centre, pour la fermeture de certaines routes forestières à la circulation motorisée incontrôlée.
Madeleine Troncin a préparé son départ, en 2000, et a su faire appel à une nouvelle équipe, bien que s’y dévouent encore des
« anciens » tels Jean-Claude Brault et François Ducarme. Après l’intérim de l’abbé Bernard Merlette (2000-2001), c’est Hugues de Grandmaison, expert forestier (dévoué à
l’ « Ecole de la Forêt ») qui préside la Société, secondé notamment par Martine Tailledet et par Didier Dumay qui a pris en main la réfection des poteaux du massif de Compiègne,
ainsi que de Laigue et Ourscamp-Carlepont, permise grâce à une étroite coopération avec l’ONF, maîtresse d’œuvre d’une opération à la fois indispensable et médiatique. Avec ce nouveau président,
l’équipe a été renouvelée, l’audience élargie ; la réussite de la Journée de la Fédération le 11 septembre 2009, sur l’exploitation forestière mécanisée et la gestion durable, à l’Institut
Charles Quentin de Pierrefonds, a prouvé sa vitalité.
La SPFC s’est donc fait respecter et a su se faire écouter, après quelques escarmouches avec l’ONF, fatales étant donné la politique dans
laquelle risquait de s’engager cet héritier de la Conservation des Eaux et Forêts. La Société s’est consacrée à une meilleure connaissance du massif forestier auquel elle veut intéresser le plus
grand nombre et en particulier les nouvelles générations. Elle défend l’intégrité et le caractère de son massif, tout en se fédérant avec toutes les forêts domaniales plus que jamais solidaires.
Les équipes se succèdent mais les objectifs sont identiques, ainsi que les méthodes mais sans cesse adaptées. Le secret de la persévérance c’est évidemment l’amour de la forêt qui nous prodigue
–si nous le voulons bien- à la fois beauté et santé. Il faut aimer la forêt, non d’un amour platonique, parfois désespéré, trop romantique, mais d’un amour actif et intelligent.
De 1969 à 1973, ce docteur en médecine fut dans les gouvernements Chaban-Delmas et Messmer.
Les coupes rases seront désormais exceptionnelles car on lui préfère la régénération naturelle donnée par la nature et
gratuite, sauf si la hêtraie, particulièrement sensible, dépasse l’âge de 130 ans. La coupe rase sera limitée à la régénération de pin sous pin, le plus souvent du mélèze et à la création
d’une futaie à partir d’un peuplement médiocre non susceptible de se régénérer lui-même, tel un peuplement trop âgé après échec de la régénération naturelle. En cas de régénération naturelle
par coupes progressives, le laps de temps entre coupe d’ensemencement et coupe définitive –fonction du tempérament de l’essence (quelques années pour le chêne pédonculé, essence de lumière)-
doit être le plus bref possible, période critique pour le peuplement et pour le public.
Selon les règles de l’affectation d’immeubles domaniaux au service de l’Etat, loi du 14.6.1833.
Concession du 21 octobre 1849 : 24 ha (succédant à une précédente dont le bail expirait en 1850), puis concession du 9 janvier 1879 : 52 ha.